Un an. Il y a tout pile un an, Lyanna gambadait dans les rues de Soho, le soir dans l'espoir même de satisfaire sa soif. Elle rentrait toujours dans un état lamentable, assez lamentable que pour ne plus rien ressentir émotionnellement d'autre que : ma tête tourne. Presque huit mois étaient passés depuis qu'elle avait osé mettre des mots sur ce qui lui était arrivé, des mots qu'elle avait écrit à son frère, incapable de lui en parler de vive voix. Depuis tout ce temps, les choses avaient changé, positivement.

Du moins, Lyanna avait essayé d'avancer, pour ne pas sombrer comme beaucoup de personnes l'auraient fait et ça avait été sincèrement difficile, mais la présence de Félicia l'avait beaucoup aider à ne plus trébucher. Puis... Il y avait Elijah et Marty qui avaient été des personnes exemplaires contribuant à faire sourire la jeune femme et lui faire voir les bons côtés de la vie.

Ce soir-là, Lyanna marchait à Leicester Square, en direction de l'appartement dans lequel vivait son frère. Contrairement au passé, elle ne gambadait plus inconsciente et alcoolisée, non elle était consciente, sobre et se promenait avec une bouteille de boisson gazeuse qui ressemblait au champagne, le genre de truc qu'on vous sert lorsque vous êtes gosses vous faisant croire que c'était la même chose que les adultes. Elle avait profité de la sortie de quelqu'un de l'immeuble pour y entrer et monter en direction de la porte de l'appartement où vivait son frère. Elle ignorait s'il était là en réalité, elle ne l'avait pas prévenu, mais au pire, son colocataire le dirait en ouvrant la porte. La jeune femme appuyait sur le bouton de la sonnette à côté de la porte avant de se reculer d'un pas. Tout ce qu'elle voulait ce soir, c'était de profiter d'Elijah, de boire des boissons d'enfant et accessoirement de l'embêter, comme au bon vieux temps. J'espère que tu as soif. Parce que je n'ai pas d'alcool. Avait-elle dit en riant un peu avant de se glisser à l'intérieur de l'appartement, se tournant vers cette tête qu'elle n'avait pas assez vu récemment à son goût. Et aussi parce que je souhaite tout apprendre sur ta vie, mais surtout sur ta relation et tes sentiments concernant cette petite tête blonde qui t'accompagne à chaque fois et que tu regardes avec des yeux de bichette. Disait-elle en riant un peu en le regardant. Ce soir, elle était enfin prête après tout ce temps, prête à répondre aux questions de son frère s'il voulait, les questions sur ce qui c'était passé l'été dernier.

Depuis que tu étais au courant de l’horreur qu’avait vécu ta sœur lors de ses soit-disant vacances, difficile pour toi, de ne pas te sentir responsable. Bien évidemment, n’importe qui de raisonnable aurait pu te secouer et te dire que ce n’était pas de ta faute, que ce n’était pas toi qui avais commis l’irréparable. Mais tu ne pouvais pas t’empêcher de te dire qu’avec toi dans ses valises, une chose aussi terrible que celle-ci n’aurait pas pu arriver. Pas parce que t’es de nature à jouer les gros bras, simplement, lorsque l’on menace tes proches, tu as la facheuse tendance à te transformer, tel Dr Jekyll et son acolyte, Mr Hyde. Bien sous tous rapports ou presque, il ne fallait pas non plus te chercher de trop près. Mais surtout, tu t’en voulais de n’avoir rien vu venir, de n’avoir pas réussi à la mettre suffisamment en confiance pour parler de ses maux. Echec que t’as du mal à encaisser, tout comme ses révélations par sms il y a de ça quelques mois. T’as pas su quelle était la meilleure façon de réagir, à défaut, t’as été toi même. Pas le mieux sans doute, mais pas le pire. Vous n’en aviez pour autant jamais reparlé, tu savais pas comment aborder le sujet, ni si elle voulait qu’on l’aborde. Dans le doute, tu la laissais venir à toi à ce sujet.

Tu n’avais rien prévu, ce soir là. Ca devait se jouer entre Shaky, toi et ton putain de texte qu’il t’était impossible de faire entrer dans ta tête, à croire que t’avais viré Alzheimer avant l’heure. Concentré, tu sursautais presque en entendant ta sonnette, et te déplaçais jusqu’à la porte « Lyly ?! » sans attendre, tu serrais ta sœur dans tes bras, et lâchais une oeillade à ton salon « ouais… euhm… fais pas gaffe au bordel. J’ai pas franchement pris le temps de faire le ménage. » pas besoin non plus, il faut dire. Tu restes rarement plus de deux heures, chez toi, si bien que t’aurais presque pu confondre avec une chambre d’hôtel. A sa remarque, tu éclates de rire « soif ? Bien sûr. J’ai toujours soif ! On m’appelle le puits sans fond, dans le milieu ! » tu lui tires la langue et l’attires à l’intérieur avant de fermer la porte derrière vous. « wow wow wow doucement ! Avant de parler d’amour et de vomir des arcs-en-ciel… tu veux pas te poser ? » tu réprimes un rire, mais t’es pas plus à l’aise : parler de ce genre de sujets, depuis la mort de Charlie, ça t’a toujours fait paniquer. Idiot ? Sans doute, mais tu te contrôles pas, là dessus. Tu vas chercher de quoi grignoter et des verres et te poses sur le canapé, sur lequel tu replies ton script que tu balances sur l’étagère de la table basse « et toi avec Marty ? Vous vous mariez quand ? » clin d’oeil moqueur, tu attrapes la bouteille qu’elle a apporté et en examine l’étiquette « alors… qu’avons nous là… Du champomy ? Ho waouh ! Tu pouvais pas me faire plus plaisir ! Comment t’as su ? » tu lui tirais la langue, moqueur et fis péter le bouchon avant de la servir puis de te servir toi aussi « à ta santé soeurette ! »

Il y a un an, Lyanna a traversé une période difficile. Après des vacances désastreuses en famille, elle s'est enlisée dans une dépendance à l'alcool et a perdu tout contact social. Puis, DarkRose, ou plutôt Marty, est apparu dans sa vie. Sans même s'en rendre compte, il l'a aidée à retrouver confiance en elle, à restaurer sa foi en les hommes et à lui redonner la volonté de se battre et de se relever. En rendant visite à son frère aujourd'hui, son principal désir était de rattraper le temps perdu. Elle a passé une année à tenir Elijah à distance, gardant ses secrets, alors qu'au fond, il était le premier homme de sa vie.

Elle était consciente de ne pas avoir été une sœur exemplaire et qu'elle avait probablement manqué de nombreux moments dans la vie d'Elijah. Cependant, elle était déterminée à se remettre en selle, car il valait mieux tard que jamais. Cette soirée lui offrirait également l'occasion de rassurer son frère quant à son état mental et physique, afin qu'il puisse voir que, fondamentalement, Lyanna allait bien, enfin, surtout mieux. Pour elle, c'était important que son frère le voie de ses propres yeux. J'ai fait une cure pour l'alcool. Tant que je ne suis pas certaine de pouvoir en boire avec modération, je préfère m'abstenir. Tu vois, j'ai changé, fini les bêtises avec l'alcool, à sortir tard et rentrer avec des inconnus. Je suis raisonnable maintenant, disait-elle en riant un peu. Avachie sur le canapé, Lyanna s'installait comme chez elle en souriant à son petit frère lorsqu'il mentionnait le prénom de l'homme qui lui avait redonné goût à la vie.

Demain... Nan, je plaisante. Tout doux. On a toute la vie devant nous, puis le pauvre risquerait de stresser en entendant le mot mariage. Nan, je pense qu'il faut... Prendre son temps et ne pas brûler les étapes, disait-elle en secouant ensuite la tête. Ne change pas de sujet, morveux, je veux tout savoir sur ta potentielle amoureuse, insistait Lyanna en trinquant avec son frère. Ce n'était pas du champagne, mais ça lui convenait et ça lui faisait plaisir qu'il prenne ça avec humour. Et aussi à ta santé, quelle question ! ajoutait-elle en souriant.

Depuis quelques temps, tu avais moins de nouvelles de ta sœur. En réalité, ça t’inquiétait autant que ça te culpabilisait : car si on y réfléchissait deux minutes, toi aussi, tu aurais pu prendre de ses nouvelles, mais tu avais toujours peur d’arriver comme un cheveux sur la soupe. Ou plutôt… comme un Eli dans le salon de ta sœur. Car oui, c’était tellement habituel, que cette expression pouvait presque figurer sans aucun problème dans la nouvelle édition du dico. Tu changes de sujet, lorsqu’elle vient à te poser des questions sur la blondinette à laquelle tu penses un peu trop en ce moment. Ce qui toi même, te perturbe. Tu sais que tu n’y penses pas comme à une amie, mais tu n’y penses pas non plus comme tu pourrais penser à Féli. Tu comprends dans quel sens tes sentiments vont, t’es pas idiot. En revanche, être prêt à l’accepter, ça… t’en es pas encore près. A chaque fois que tu pourrais imaginer quelque chose, Charlie revient peupler tes nuits. Comme si elle avait peur que tu l’oublies. Comme si tu t’étais interdit d’être heureux autrement qu’avec elle. Alors plutôt que d’expliquer tout ça à ta sœur, tu préfères changer de sujet et lui retourner la question, s’agissant de Marty. Tu arques un sourcil et te mets à sourire, un regard lourd de sens porté à ta sœur « ça le mettrait en panique… mais tu ne dis pas non. Serait-ce le bon ? » tu lui adresses un sourire amusé : dans le fond, c’est tout ce que tu souhaites à ta sœur : forcément, tu ne peux pas t’empêcher d’être protecteur envers elle, mais du moment qu’elle est heureuse, c’est tout ce que tu demandes. Tu lèves les yeux au ciel et te retourne, prétextant d’attraper de quoi grignoter. Tu veux te donner une contenance, mais comment y arriver, lorsqu’à la simple mention d’Enéa, un sourire idiot trahit ton intérêt ? Tu soupires et te grattes la tête, mettant des Pringles dans une coupelle « qui te dit que j’ai quelqu’un en vue en ce moment ? Tu parles d’Enéa, qui est venue avec moi quand on s’est retrouvés chez Féli ? » tu marques une pause, tu ne sais pas quoi dire : le simple fait de l’avoir emmenée chez une amie proche commune à vous deux en dit long sur ta relation avec elle. Tu hausses les épaules et essaies de donner le change : « je ne sais pas ce que tu t’imagine, Lyly. C’est juste une collègue. Elle est doubleuse, j’ai connu sa voix avant de connaître son visage. » tu souris et prends une gorgée de ton verre « et… Elle m’apprend. C’est nouveau pour moi. Rien à voir avec la scène. Alors... » tu hausses de nouveau les épaules et reposes ton verre. Tu sais très bien que ta sœur a sans doute compris ton petit manège, mais t’es très bien dans ton déni. « j’sais pas. Qu’est ce que tu veux savoir de plus ? » tu te forces à garder la porte ouverte à ce sujet que tu préfèrerais laisser de côté. Admettre que t’as de l’intérêt pour elle, c’est admettre que tu commences à oublier Charlie et ça, tu refuses.

Lyanna donnerait cher pour remonter le temps et revenir à cette époque où elle et Elijah passaient toutes leurs journées ensemble. Il lui manquait. Il lui avait manqué et elle chérissait chaque moment passé en sa présence, ça lui permettait de profiter à 300%, comme maintenant. Tu dévies le sujet," disait-elle en comprenant le plan de son frère, le pointant du doigt en riant un peu, loin d'elle l'envie de le mettre mal à l'aise. Elijah Artwood, je t'ai démasqué. Tu es malin punaise, j'ai failli tomber dans le panneau ! Lyanna venait le décoiffer d'une main avant de lui caler un baiser sur la joue. Petit malin. Mais, loin d'elle l'envie de l'obliger à parler de quelque chose dont il ne souhaitait pas parler. Pour répondre à ta question, je ne sais pas. Peut-être. Je me sens bien avec lui, je ne peux pas l'expliquer, mais c'est la première fois que je me sens aussi bien. Marty, c'était son évidence, l'homme avec qui tout semblait plus simple, moins dramatique et pour qui elle décrocherait la lune.

Elle se donnait quelques secondes de réflexion, cherchant un peu ses mots pour qu'ils soient aussi exact et représentatif. Mais, pour être sincère, je me sens bien avec Marty. On verra où ça nous mènera avec le temps, mais pour le moment je me sens vraiment bien. Disait-elle en souriant en le regardant. C'était mignon de le voir un peu se justifier concernant Enéa. Le soucis ? C'est que c'était Lyanna et qu'elle était probablement l'une des personnes qui connaissait le mieux Elijah. Elle le regardait en souriant, il était mignon en vrai. Je vois... Tu sais que ton regard peut en dire long ? Hé, allez j'suis ta sœur, tu me dois d'être honnête. Disait-elle en lui souriant en lui frottant le haut de la tête d'une main. Mais, quand il demandait ce qu'elle voulait savoir de plus, elle réfléchissait un peu en souriant. Je ne sais pas trop... Mais, toi aussi si tu as des questions, n'hésites pas.

Parler de ta vie amoureuse ? T’as toujours eu du mal. Que ce soit en famille ou avec tes amis, t’as toujours délibérément changé de sujet, juste pour être tranquille. Et surtout, aussi, probablement parce que t’es putain de pas mûr, émotionnellement. Un putain de gamin qui n’assume pas. Voilà comment tu pourrais te décrire. Mais la vérité est elle celle-ci ? T’en sais rien. Ce qu’on ressent est tellement différent de ce que les autres perçoivent… enfin, t’as pas le temps pour une psychanalyse express, tu dois servir une réponse à ta sœur, et vite. Sans surprise, tu choisis de nouveau la fuite… mais elle a trop d’années d’expérience, avec toi. Elle a compris ton manège. Tu ricanes et prends un air naïf « moi ? Vraiment pas. Je vois pas du touuut de quoi tu parles ! » et tu hausses les épaules « bon. Ok. Prépares toi à avoir une réponse que je ne t’ai jamais donnée et ensuite, on passe à autre chose, d’accord ? » tu attends un signe d’approbation de sa part, prends une grande inspiration tant cette discussion te gêne. T’as l’impression d’être un putain d’enfant de onze ans « j’apprécie Enéa suffisamment pour ne pas avoir envie de la faire sortir de chez moi au bout d’une nuit. Et suffisamment aussi pour, peut-être, avoir envie de me projeter avec elle. Dans tous les cas si tu veux tout savoir… on passe de plus en plus de temps ensemble. Tires en la conclusion que tu veux. » tu lui adresses un clin d’oeil et passes une main dans tes cheveux ébouriffés précédemment par Lyanna, et tu poses ta tête sur l’épaule de celle-ci : t’es étrangement plus à l’aise dans le rôle de celui qui écoute que de celui qui parle. Tu dis « étrangement », parce qu’après tout, n’est-ce pas le comble pour un comédien, de ne pas être capable de parler ou du moins, de comprendre ses émotions ? Un sourire étire tes lèvres et tu déposes un baiser sur sa joue « j’suis content pour toi. Il a l’air cool. Enfin, il a pas l’air méchant, en tous cas. Mais si jamais un jour il se passe quoi que ce soit, tu sais que je suis là, hein ? Je rigole pas ! Tu m’appelles, même en pleine nuit, et je viens te chercher ! » et n’oublies pas de me filer l’adresse de celui ou de celle qui ose te faire du mal, histoire de brûler sa baraque, que tu penses. Mais tu t’abstiens. Tu hausses les épaules et ris « mais je l’ai été, honnête, j’ai tout donné, madame ! Tu sais très bien que c’était mon max, ça ! » tu ris « hm… si, j’en ai une ! Tu l’as rencontré comment, Marty ? » que tu demandes dans un sourire avant d’enchaîner « il a des enfants ? Il fait quoi dans la vie ? » bon, ok, clairement, là, tu abuses. Parce que ta sœur te l’a très certainement dit. Mais le problème avec toi, c’est que les choses entrent par une oreille et ressortent par l’autre. A se demander comment tu apprends tes textes, tiens !

S'il y a bien une personne que Lyanna connaissait par coeur, c'était son frère, mais elle espérait qu'il ne soit pas fermé à l'idée de parler de sentiment. D'autant plus qu'elle était la dernière personne capable de le juger ou de simplement se moquer. Mais, s'il ne souhaitait pas en parler, elle ne le forcerait pas, parce qu'en se mettant à sa place, elle n'aimerait pas avoir quelqu'un de si insistant. Lorsqu'il lui annonçait qu'il allait lui donner une réponse inédite, elle le regardait, presque émerveillée à cette idée. Elle l'écoutait, comme si elle écoutait une histoire qu'on lui lisait étant petite. D'accord, je vois. J'en conclus rien, je veux juste que tu sois heureux. Et merci de me l'avoir dit, sincèrement, ça me fait plaisir. Disait-elle en lui souriant grandement, comme une enfant qui venait d'obtenir ce qu'elle voulait. Enfin, ce qu'elle voulait surtout c'était qu'il soit heureux et si cette fille arrivait à le rendre heureux, alors Lyanna était contente. Oh, protecteur le ptiot. Disait-elle en souriant en profitant de ce baiser sur sa joue, ce geste qu'elle avait tant apprécié lorsqu'elle était en pleine chute dans sa vie. Je ne pense pas que Marty soit comme ça, mais promis si un jour il mérite une bonne leçon, je t'appellerais. Elle était amusée de ces paroles, parce qu'elle n'avait jamais imaginé Marty méchant, il était si doux, gentil. Vous avez le même humour éclaté. Disait-elle en riant un peu. Elle écoutait sa question concernant sa rencontre avec Marty, rencontre le moins romantique et aussi la plus wtf qu'elle ait eut dans sa vie. Sur un jeu vidéo, j'avais un personnage de type grand fort et musclé comme toi. Et en face, je me suis fais une amie, un perso super canon tu vois. Et j'avais l'impression de m'être fait une super amie, on passait des heures à parler, je me sentais bien et puis, un jour je lui ai dis : rencontrons nous. J'étais assise à cette table le jour j en attendant mon amie, j'avais l'impression qu'on me posait un lapin et puis y avait ce gars avec qui j'ai discuté et tu te doutes, c'était Marty. En discutant on s'est rendu compte qu'on s'attendait mutuellement et puis voilà... On a continué à se voir et ça c'est fait de façon tellement naturelle que je ne l'ai pas vu venir. Disait-elle en souriant, son histoire avec Marty était improbable, mais elle la chérissait tant. Les rencontres les pus imprévues sont aussi les meilleures, non ? Oui, il a un fils, Marvin.