La porte de l’appartement passé, je retirais mes chaussures. Un pli que j’avais rapidement pris en comprenant que ça faisait partie des coutumes du coréen. Respectant les règles sans aucun problème, j’avais rapidement pris cette habitude. Son bras se glissait sous le mien et il m’entraînait avec lui vers l’intérieur des lieux. Avec beaucoup de passion, le maître des lieux m’expliquait le programme détaillant un peu plus pour m’aider à saisir de quoi on parlait. « BL, romance entre hommes réputés en Asie et en Occident. Enregistré. », répétais-je à la fois pour enregistrer l’information et, aussi, pour lui montrer que je l’écoutais avec une attention presque scolaire. « Ça a l’air prometteur. », ajoutais-je finalement avec un sourire. Tandis qu’il haussait les épaules sourire aux lèvres. Si j’avais l’impression que Jaemin était ravi de pouvoir partager son univers avec quelqu’un, la grande amatrice de cinéma que j’étais apprécié grandement sortir de sa zone de confort et découvrir des scénarios, des contextes, des techniques, différentes. Le coréen continuait ses explications en m’invitant à m’installer à ses côtés. Un léger rire s’échappait d’entre mes lèvres. « Je te crois sur parole. », lui adressais-je. Il était bien plus renseigné sur cet univers que moi. « Pas qu’en Corée. », admettais finalement volontiers. « Ça tend à changer, mais il est vrai que la communauté LGBT+ a eu beaucoup de mal à ne plus être mise de côté dans le cinéma en général. Mais on progresse ! C’est plutôt cool ! », étayais-je avant de lui adresser un sourire qui appuyait le fait que je puisse trouver ça vraiment chouette. Après tout, il en fallait pour tous les goûts et il était vrai que de ce côté-là, les personnes LGBT+ n’avait, jusqu’à il y a quelques années que très peu de classique auxquels s’identifier. Il me donnait enfin un titre, j’aimais savoir ce que je regardais et j’appréciais encore plus pouvoir en parler en m’appuyant sur des connaissances quand il s’agissait de cinéma. « La prochaine fois, on fera ça en grand ! », lui adressais-je avec un sourire alors qu’il tapotait sur sa télécommande. « T’as déjà fait un cinéma en plein air ? », demandais-je avec intérêt. Je trouvais qu’il n’y avait pas mieux que de projeter en grand un film sur un drap blanc. Intérieur ou extérieur, je trouvais que ça donnait une tout autre sensation lors de la séance. « Merci, pour les sous-titres. », lui glissais-je à l’oreille alors que le film démarrait. Je devais admettre que le coréen n’était pas encore à ma portée, mais rien n’était impossible quand on y mettait les moyens…

Je relevais le menton en ouvrant un peu plus grand les yeux en comprenant l’abréviation suite à ses explications. Ça faisait sens à présent. Puis, la conversation s’ouvre sur la représentation LGBT+ dans le septième art. Une moue attristée vient tirer les traits de mon visage. « C’est tellement triste, tout le monde devrait avoir le droit d’aimer qui il souhaite librement, n’importe où. », affirmais-je avec conviction. Je le pensais sincèrement, personne ne devrait avoir à juger ce genre de chose encore moins au niveau pénal. Pour moi, c’était incompréhensible. Utopiste et sûrement un peu naïve, j’aimais à penser que l’amour quand il est source de partage ne pouvait être que beau quel que soit la forme qu’il prend. Finalement, peut-être que je n’étais pas née dans la bonne époque. Souvent, ma mère me disait que les années soixante et le mouvement hippie me correspondait davantage. Puis, je lui proposais, la prochaine fois, de nous prêter à l’exercice dans un cadre plein air. Un sourire étirait mes lèvres lorsqu’il avouait qu’il n’avait jamais tenté l’expérience. « Alors c’est une certitude, la prochaine fois, tu choisis le film et on fait ça à ma manière ! », affirmais-je avec beaucoup d’entrain. « Tu verras, c’est tellement, différent. C’est comme une séance de cinéma, mais en beaucoup, beaucoup plus agréable. », ajoutais-je en m’emportant un peu dans mon excitation. J’aimais tellement le cinéma plein air, la fraîcheur de l’air qu’on respire, les coussins étalés sur le sol et ce grand drap blanc en guise d’écran. « Tu verras, c’est tellement, différent.», affirmais-je entrainer par mon excitation. Et puis admettons-le, si j’aimais le cinéma, j’aimais encore plus sentir l’air frais s’effiler dans mes poumons. Alors allier les deux ne pouvait qu’être une bonne idée. Le drama lancer, mon regard vagabondait sur l’écran, alternant entre les sous-titres et les images. Sans quitter l’écran des yeux pour ne pas en perdre une miette, je penchais légèrement la tête vers mon ami pour l’écouter avec attention. « Oh, ce sont ces mangas que les gens postent sur le net, c’est ça ? », demandais-je avec intérêt en essayant de ne pas trop me perdre entre la conversation, les sous-titres et le film. Je devais admettre que tout ça ne faisait pas partie de mon univers habituel, mais j’appréciais de sortir de ma zone de confort et de m’essayer à de nouvelles choses. Alors je me renseignais, en parlant avec beaucoup de simplicité. Pas par manque de respect, mais seulement parce que je n’étais pas familière avec tout ça. « Il porte le même nom ? », ajoutais-je toujours sans lâcher l’écran du regard. Après tout, si le drama me plaisait, pourquoi ne pas aller jeter un œil à ce webtoon ?

J’avais de la peine à me rendre compte que le monde était vraiment comme il le décrivait. Je vivais sur mon petit nuage, dans ma bulle faite d’amour et de bienveillance. C’était difficile pour moi de comprendre pourquoi. Pourquoi le monde pouvait faire preuve de cruauté. Évidemment, je savais que ça existait, les gens malveillants, les sadiques et autres personnes malintentionnées. Mais j’avais seulement beaucoup de mal à comprendre leur motivation. Moi, j’aimais juste la vie et le monde. Je trouvais tout et tout le monde intéressant. Mais j’avais aussi parfaitement conscience que mon côté ouvert et utopiste n’était pas du goût de tous. « Je suis incapable de comprendre. Pourquoi le monde n’arrive pas à juste accepter les autres comme ils sont, avec leur identité, leur différence, c’est pourtant tellement beau de découvrir l’autre. », affirmais-je un peu rêveuse. Je n’y pouvais rien, ça faisait partie de moi, je ne le comprenais tout simplement pas. Je pouvais prendre la situation dans n’importe quel sens, j’arrivais toujours à la même conclusion. Puis, la conversation finit par prendre un autre tournant et un sourire illumine mon visage à sa question. « Récents, anciens, intemporels, cultes. On peut tout voir, c’est ça qui est super ! », avouais-je avec beaucoup d’enthousiasme. « Oh, ça existe. Mais je préfère les séances plus... Intimiste ? », tentais-je sans être certaine du terme. « J’aime bien m’installé sur le toit de mon immeuble, tendre un grand drap blanc et projeter mon film confortablement installé sur un tas d’énormes coussins tout doux ! », expliquais-je le regard pétillant. En général, c’étaient mes moments à moi, mais il arrivait que je laisse certaines personnes entrées dans cette petite bulle personnelle que j’appréciais me construire. Lorsqu’il m’expliquait davantage la notion de webtoon, j’ouvrais grand les yeux en comprenant un peu mieux de quoi il s’agissait. « Ça signifie que tout le monde peut y partager son art tant qu’il répond au format webtoon, c’est ça ? Si c’est le cas, c’est génial ! C’est tellement chouette pour ceux qui n’ont pas encore de nom. Ceux qui veulent s’essayer à l’exercice … », affirmais-je avant même d’être certaine d’avoir bien saisi le principe. De toute façon, j’étais du genre à m’extasier sur tout ce qui permettait de laisser libre cours à son expression artistique alors, forcément, l’idée me plaisait beaucoup. Le premier épisode se termine et Jaemin s’assure que je suive avec beaucoup de bienveillance. Un sourire étire mes lèvres et je réponds par l’affirmative d’un simple signe de la tête. « C’est triste, j’espère vraiment que la situation va s’améliorer. », avouais-je avec une moue un peu enfantine. Je jetais rapidement un coup d’œil sur l’écran de mon téléphone, pour m’informer sur l’heure. Pas que passer du temps avec mon ami ne soit pas à mon goût, mais j’avais une audition en fin de journée pour prêter ma voix à un nouveau personnage. « On a encore le temps d’en regarder un second si tu veux. Après, je devrai filer, j’ai une audition en fin d’après-midi pour un potentiel nouveau doublage. », avouais-je avec un peu d’excitation dans la voix. J’aimais réellement mon métier et je ne m’en cachais pas vraiment…

« C’est triste. », avouais-je avec beaucoup d’honnêteté dans la voix. Ce fut ma seule réponse, parce qu’au fond, il avait raison. Changer le monde était impossible ou en-tout-cas ça ne pourrait pas se faire en un claquement de doigts. Alors que pouvais-je bien ajouter de plus ? L’épisode touchait à sa fin et je précisais que j’avais certainement encore le temps d’en regarder un avant de devoir filer pour me rendre à un rendez-vous professionnel. Mais, bien entendu, ce n’était que partie remise pour découvrir la suite de la série qu’il semblait tant affectionner. J’en profitais pour lui proposer de faire les choses à ma manière la prochaine fois. La séance en plein air était pour moi l’une des meilleures façons de voir un film. C’était tellement différent d’une séance enfermée dans un cinéma. Le côté personnel me séduisait davantage, même si je n’étais jamais contre un petit tour au cinéma pour découvrir les dernières nouveautés, évidemment. Son enthousiasme me faisait sourire. « J’espère que ça te plaira autant qu’à moi. », avouais-je avec entrain. Puis, Jaemin continuait de m’initier à son monde cinématographique, que je comprenais petit à petit au fil de la discussion. « C’est vraiment génial ! Je trouve ça super qu’on puisse partager son univers, ses créations et sur le long terme espérer vivre de cette passion rythmée par son imagination. », argumentais-je. C’était un peu comme une version 2.0 de l’adaptation de roman au cinéma, l’idée me séduisait assez. Mon enthousiasme était visiblement communicatif, un rire s’échappait d’entre mes lèvres. « J’adore mon métier. Je pense que j’ai vraiment de la chance d’avoir un job dans lequel je me sens autant épanouie. Alors savoir que j’ai l’opportunité d’avoir de nouveaux contrats, c’est toujours très stimulant pour moi. », expliquais-je avec un radieux sourire. « On verra bien l’issus de l’audition, mais au moins, je me serais éclatée ! », précisais-je pour appuyer sur le fait que, même si ça ne marchait pas à tous les coups, j’étais très heureuse de l’expérience que ça m’apportait. Puis, mon ami lançait le nouvel épisode, l’histoire était difficile et je devais admettre que certaines informations me pinçaient le cœur. Mais n’était-ce pas là le signe qu’une œuvre était un succès ? Quand ça vous prend aux tripes et que vous êtes emportés dans le scénario au point de ressentir un tas d’émotions vous parcourir le corps ? Très concentrée, je suivais avec attention le déroulement de la suite, mon regard tentant de trouver le bon rythme entre la lecture des sous-titres et le plaisir d’observer les diverses scènes…

Ses mots m’allaient droit au cœur, et mon doux sourire en témoignait. J’étais de ces personnes à qui apporter un peu de lumière dans la vie des autres comptait beaucoup. “C’est adorable. Et le plaisir est partagé.”, rétorquais-je en déposant ma main sur le haut de ma poitrine, juste au-dessous de ma gorge. Signe qui trahissait là encore à quel point cette simple phrase me touchait. Jetant un œil sur ma montre, j’avais encore le temps pour un épisode avant de devoir filer, mes obligations professionnelles ne me permettant pas de lui accorder l'entièreté de mon après-midi. Puis, il m’expliquait à nouveau, son univers et toute l’immensité de ses inspirations. Je trouvais ça vraiment chouette que des gens puissent vivre de leur passion. Ça me semblait tellement important de pouvoir le faire. “”W” tu dis ?”, reprenais-je pour montrer mon intérêt. “J’irais jeter un œil ce soir en rentrant.”, avouais-je impatiente d’en découvrir encore plus sur ces dramas dont il me parlait et qui était en pleine expansion. Étirant mes bras au-dessus de ma tête, je poussais un soupir de détente. “On verra bien, je ferais tout pour en-tout-cas.”, avouais-je avec franchise. “Tout le monde devrait pouvoir vivre son métier avec les tripes. C’est tellement plus intéressant quand c’est le cas.”, précisais-je avec conviction. Je m’étais essayée à beaucoup d’activités. Créative pour la plupart, mais c’était vraiment celle-ci qui m’avait fait le plus vibrer. J’avais l’impression d’y être à ma place, d’avoir enfin trouvé ce dont j’avais besoin pour exister pleinement. Puis, le silence s’installait à nouveau, le temps du second épisode. Il n’avait rien de pesant, il était juste paisible et agréable. Je faisais de mon mieux pour suivre la totalité des informations qui défilaient sous mes yeux. L’histoire avait une profondeur, une intensité et un côté très touchant qui ne m’échappait pas malgré les allers-retours de mon regard entre sous-titre et image qui défilait rapidement. Mais dans mon métier, c’était mon quotidien cette gymnastique visuelle, même si on se concentrait davantage sur le texte que sur les images. L’épisode touchait à sa fin et, je ne pouvais m’empêcher de sentir ma gorge se nouer sous l’émotion. “Ce genre d’histoire me sert toujours le cœur.”, avouais-je en raclant ma gorge pour faire passer cette boule qui s’y était formée. “J’ai hâte d’en découvrir la suite. Tu me donneras tes disponibilités à l’occasion, j’essaierais de faire en sorte d’être disponible plus longtemps.”, proposais-je avec un radieux sourire aux lèvres. “Je suis navrée de ne pas pouvoir t’accorder plus de temps.”, ajoutais-je avec une pointe de regret dans la voix. Peut-être avais-je un peu peur de lui faire de la peine en ne passant plus de temps de cette journée en sa compagnie, mais je n’avais pas vraiment le choix cette fois-ci. “Promis, je me rattraperai la prochaine fois !”, concluais-je avec un sourire sincère et un regard rempli d’affection. Parce que j’étais comme ça dans le fond, une petite blonde remplit d’amour pour les autres, de bonne volonté et désireuse de partager de beaux moments avec les gens qui comptaient pour moi. Malheureusement, parfois, il fallait savoir trouver un équilibre, on ne pouvait pas toujours faire ce qu’on voulait quand on le voulait. Mais c’était aussi ça la vie.