"La drogue c'est mal, m'voyez". Plus le temps passe, plus je me dis que j'aurai mieux fait d'écouter les conseils de Mr Mackey, dans South Park. Mais bon, il faut bien que jeunesse se fasse. Et puis c'est pas le foyer qui nous a empêché de faire des conneries, avec les potes. Niveau surveillance, c'était pas la Champions League de la sécurité, si vous voyez ce que je veux dire. Si vous chercher le mot laxisme dans le dico, vous y trouverez le nom du foyer en guise de définition. A dire vrai, je n'ai pas le souvenir d'une nuit où je suis resté sagement étendu dans mon lit à attendre Morphée. Et cela ne s'est jamais arrangé, au contraire. Plus les années passaient, plus les virées nocturnes se faisaient longues.

Au début, nous sortions pour faire du skate et jouer à Air-Pokemon. Nous nous prenions pour des dresseurs émérites, mais sans pokéballs. Puis nous avons laissé tomber la planche et les monstres de poche pour mater les filles plus âgées qui passaient sur les berges de La Scioto, à la sortie des bars. Puis à l'âge requis (à une poignée d'années près), c'était à notre tour d'aller squatter les bars de nuit. Il était largement temps pour nous de perdre notre pucelage. Etait-ce la faute de l'alcool ou de la puberté, nous n'avions pas pécho comme nous l'aurions souhaité. Puis après un temps, l'alcool ne nous contentant plus, nous avons commencé à toucher à des choses bien plus fortes... et illégales.

Ca commence par une taffe, pour essayer, puis trois, parce que ce n'est pas si mal, après tout. Puis un spliff entier. La suite, vous vous en doutez. L'engrenage. Le joint ne suffit plus, alors on essaie autre chose. Coke, crack, héroïne, puis d'autres trucs dont je ne connaissais ni le nom, ni la provenance, à l'époque. Mais on kiffait. Nous étions jeunes, sans responsabilité, insouciants. On en a fait des conneries. A force de cotoyer les dealers, j'ai commencé à agrandir mon carnet d'adresse, puis j'ai pu trouver des contacts, puis des contacts de contacts. De fil en aiguille, j'ai pu m'approvisionner au-dela de ma conso perso. J'avais à la fois les fournisseurs et les clients. Alors j'ai commencé à revendre.

C'est précisement à cet instant que vous me dites: "Boouuuh, c'est pas bien c'que t'as fait". Ouais, je sais. Et alors ? Qu'est-ce que ça peut bien me faire ? Aujourd'hui, je suis riche. Malhonnête, certes, mais riche. Je suis à la tête de la boîte la plus branchée de tout Londres. Rien que ça. Mais ne vous y trompez pas ! Pas de drogue au sein de la boîte. Jamais. Et j'y veille personnellement. Entrée seulement sur invitation. Je sais exactement ce qui rentre et sort de mon fief. Enfin, ça c'est la face visible de l'iceberg. La vitrine. Car en coulisse, pour ceux qui connaissent "l'arrière boutique", The Sub, un monde parralèle s'ouvre à eux. Alcool, drogue, prostitution et divers trafics plus ou moins légaux.

Bien évidemment, mes talents d'orateurs m'aident beaucoup dans mes rapports avec les autorités. Ma gueule d'ange ne doit pas non plus y être étrangère. Il n'y a pas plus hors de soupçons que moi. Ou peut-être est-ce dû à mes diverses activités de mécénat pour toutes sortes d'oeuvres caritatives londoniennes. On ne va pas chercher des noises au type qui finance la moitié des associations de la ville. Je m'appelle Owen Evans, et mon empire est bien en place, caché sous la surface.